« Animacorpus »

À l’occasion de la 8e édition des Nuits de la lecture autour du thème du corps, Carmen a laissé courir son stylo et imaginé un récit qui devrait vous surprendre. Bonne lecture !

Visuel : CNL / © Chloé Cruchaudet pour les Nuits de la lecture 2024 / Conception graphique : Studio CC.

Animacorpus

Convocation en main signifiant sa sélection, il prit place dans la longue file d’attente devant le centre de métamorphose. Il était partagé entre joie et crainte car participer aux jeux allait impliquer un changement de vie radical. Le bâtiment était froid, austère avec des murs hauts comme ceux d’un établissement pénitentiaire.

Après avoir patienté plusieurs heures dans une salle blanche et aseptisé, il subit une batterie de tests pour déterminer ses aptitudes dans la catégorie saut en hauteur. Les ayant réussis, il put intégrer la team et commencer ainsi les transformations indispensables, en vue des futures compétitions. D’une main légèrement hésitante, il venait signer un engagement éclairé dégageant la responsabilité du centre et de ses dirigeants. Désormais, c’était acté. Pour lui, l’après n’aurait plus le visage de l’avant.

Aussitôt, il fut conduit en salle de travail. Encadré par deux infirmiers, il jeta un rapide coup sur le terrain multisports. Certains s’adonnaient déjà avec fougue à leurs entraînements. Il se mit à penser que lui aussi irait bientôt « performer » dans sa discipline lorsqu’il serait équipé de ses nouvelles jambes.

Première injection d’ADN de kangourou roux. Il avait mal mais refusait de se plaindre, trop heureux de savoir que son corps allait ainsi progresser, s’améliorer, se développer. Les effets se firent sentir très vite et dès le lendemain ses cuisses avaient pris vingt centimètres. A la seconde dose, il ne ressentait plus que quelques picotements, certes désagréables, mais nettement moins douloureux. Il se dit que c’était toujours le premier pas qui coûte. Le reste suivait tout seul. Cette fois-ci, il lui poussa une immense queue servant de balancier. Grâce à elle, il trouvera l’équilibre parfait pour franchir la barre de saut. Quelle extraordinaire sensation que de retrouver cet appendice caudal que l’évolution avait choisi d’oublier. Il commençait à sentir à l’aise dans ses nouveaux membres inférieurs. Bien sûr, il se montrait encore un peu maladroit mais avec beaucoup de travail et de patience, il allait faire un malheur sur les pistes. A la troisième et dernière dose, la transformation fut achevée. Tout était parfait. De plus, il aimait beaucoup la couleur de son poil allant du gris clair à un roux plus soutenu. 

Désormais, il était un hybride humain/kangourou et pouvait enfin participer aux jeux animalympiques de Paris 3024.

Il se voyait déjà sur la plus haute marche du podium, une médaille en or autour de son cou, après avoir fait exploser tous les records mondiaux. Peu lui importait qu’il ne soit plus jamais le même. Être sur le toit du monde valait bien quelques petits sacrifices.

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