« Le cycle de la famille »

Derniers récits de notre série de « Repas de familles » ! Belle ambiance et une écriture très particulière signée Adélaïde. Bonne lecture ! 

Le cycle de la famille

Elle court entre les jambes des adultes, zigzague entre les chaises en criant. Son frère la poursuit, elle poursuit sa sœur, et avec leurs cris, ils participent à l’ambiance familiale.

Les adultes eux, à table, continuent de manger. Et discuter. Et rire toujours plus fort. A tour de rôle, ils viennent jouer avec les enfants : une tour de Lego, un tour de vélo, un dessin, une bataille d’eau ou de neige selon la saison, un câlin vite terminé pour repartir jouer.

Et puis enfin les enfants s’épuisent. Elle reste sous la table, elle écoute les voix des adultes qui s’entremêlent, forment une harmonie. Parfois, elle se concentre sur une seule voix : « La voiture à 40 000 kilomètres au compteur » ; « On a remboursé la moitié du prêt déjà » ; « Tu imagines un téléphone que tu peux emmener partout ? C’est révolutionnaire » ; « Au travail, mon manager … ». Elle comprend le quart de ce qui se dit, et se laisse bercer par tous les non-dits jusqu’à trouver le sommeil.

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Elle écoute souvent le calme de ces repas. Ils sont tous grand maintenant, ils discutent tranquillement. Echangent des nouvelles des études, partagent leurs aventures d’indépendant, mais pas trop, seulement ce qui est entendable par la famille. Elle se sent dans l’entre deux : adulte et enfant. Les parents sont plus détendus, moins débordés. Et les grands-parents sont plus marqués, ralentis. Ils demandent de l’aide pour répondre au SMS ou envoyer un mail.

Elle s’ennuie souvent, elle n’a pas grand-chose à raconter et voudrait retrouver ses amis. Entendre l’histoire de gens qu’elle ne connaît pas ne l’intéresse pas. Alors elle se lève dès la fin du repas, part lire ou regarder la télé.

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Les parents sont marqués par les rides, ces mêmes rides qui clament leur nouveau statut : grand-parent. Et les bruits sont revenus. On ne s’entend plus parler : ça saute, ça court, ça rit, ça anime. Même les adultes paraissent plus vivants. Entre deux cris, on s’échange des nouvelles : le travail, les loisirs, les travaux, les vacances. Les frères et sœurs s’occupent de leurs nièces et neveux. Les grands-parents conseillent et jouent. Et les arrière-grands-parents n’entendent plus très bien maintenant et suivent la cohue comme ils peuvent. Elle est rayonne de retrouver le tapage, même si en fin de journée, elle a les oreilles qui bourdonnent.  Elle lit des histoires et pense au jour où elle-même deviendra parent.