Pour ce nouvel atelier, Carole Prieur, intervenante À Mots croisés, a accompagné les écrivants dans la préparation d’un récit qui mettrait en scène un « Village », très particulier.
Ensemble, ils ont décidé d’un lieu, de sa localisation, de sa dénomination et de sa singularité. Puis, en duo/trio, ils ont défini des personnages. Une fois, les informations partagées, chacun a imaginé son histoire du village, vue par un ou plusieurs des personnages.
Un rêve de Balnéoplagienne
Bagneux-Plage est une jolie bourgade. Tout est réuni pour passer des jours tranquilles. Le village est bien situé dans le nord du pays, face à la mer. Les balnéoplagiens ont leurs habitudes. Un des lieux de divertissement pour certains est le salon de coiffure pour papoter. La population est vieillissante. Alors que tout semblait paisible, une étrange épidémie sévit où ceux qui sont infectés entendent les pensées de leurs voisins. Chacun essaie de tirer profit de cette étrange maladie.
Maurice Vernet est le médecin du village. Outre sa méfiance et son caractère paranoïde, il cache un secret pouvant être fatal à sa tranquillité, surtout qu’il ne lui reste plus que dix ans à travailler. Son intérêt est d’éradiquer l’épidémie et surtout que ses patients infectés ne diffusent pas ses propres pensées qu’il a lors de la consultation.
En premier lieu, son ex-compagne Josiane Pinard, la coiffeuse qui se nourrit de commérages truculents mais qui avec le virus, voit sa santé psychique décliner de jour en jour.
Le lendemain, c’est le jeune Hippolyte infecté par la maladie qui passe au cabinet du Docteur Vernet pour une drôle de consultation : il veut le faire « chanter » sur les réseaux sociaux en propageant toutes les pensées du toubib.
Aux horaires d’ouverture du cabinet, une étrange petite fille nommée Iris ne quitte pas la salle d’attente puis colle aux basques d’Hippolyte pour attraper ce fameux virus. Elle est persuadée que si elle entend les pensées des autres cela l’aidera à créer des relations sociales.
Ce matin de juillet, Vernet est encore plus soucieux que d’habitude. Il pense que tout le village le déteste depuis que l’épidémie se propage. Il en est même persuadé : hier soir, il a entendu des bribes de conversation sous sa fenêtre entre Josiane et Hippolyte. Il les a observés regarder leurs téléphones portables respectifs. Il n’a pas tout entendu mais ils se marraient à s’en époumoner.
Les yeux cernés, le teint blafard par tant de contrariés, il descend lentement les escaliers et ouvre son cabinet. Il n’en croit pas ses yeux, personne n’attend et la rue est déserte. Un vent inhabituel souffle de manière irrégulière. Ce vent lui semble indiquer la direction du bar tabac. Lieu qu’il ne fréquente jamais car il est situé entre les pompes funèbres et le cimetière : une autre de ses plus grandes peurs est sa propre mort, celle des autres il s’en fout éperdument. Il n’aime personne et n’a jamais aimé : même Josiane ce n’était qu’une aventure pour assouvir ses besoins primaires de mâle alpha. Il laisse ses craintes et arpente les rues du village. Il passe devant le cimetière. Le vent lui glace les os, il relève le col de sa chemise. Il se poste devant le bar tabac et essaie de regarder par la fenêtre. Les vitres sont remplies de buées. Tellement intrigué, il ne ressent pas la discordance de cette situation en plein mois de juillet.
Seuls, des cris s’échappent de l’estaminet.
Quelqu’un lui tape dans le dos. Il sursaute. C’est la jeune Iris, qui le regarde avec des yeux implorants. Elle veut que Vernet trouve une solution pour qu’elle attrape le virus. Son air malheureux attendrit un instant le Docteur. Pourquoi vouloir l’attraper ? Il n’a pas besoin d’un autre cas à gérer, malgré qu’il adore l’appellation « Docteur ». Il a l’impression d’avoir réussi sa vie avec ce titre glorifique. Mais, il sait qu’il y a « un hic » avec cette foutue épidémie qu’il n’arrive pas à éradiquer et ses connaissances sont insuffisantes. Très rapidement, il se focalise de nouveau sur les cris…
Il aperçoit Josiane et Hippolyte, un verre de champagne à la main pour elle, et le téléphone portable pour lui. Il les voit s’esclaffer. Mais, que peuvent-ils bien fêter de si bonne heure? Il avait prescrit de fortes doses d’anxiolytiques et de somnifères à Josiane afin qu’elle oublie les pensées des autres et surtout le secret qu’elle a découvert lors de la consultation le concernant. Elle n’a pas suivi le protocole. Il le sait car il s’est informé sur les bons dosages thérapeutiques. Elle devrait être endormie pour au moins quarante-huit heures.
De nombreuses pensées l’envahissent, mais malheureusement ce ne sont pas les pensées de ses congénères. Il n’a pas contracté le virus et maintenant il est persuadé que tout le village se monte contre lui. Avant de rentrer dans le bar tabac, il sort sa main de la poche de son pantalon, pousse la porte. À l’entrée, il prend…
Ho! Un mal de tête me réveille. Je m’étais tranquillement installée dans un transat au soleil devant le bac à sable à Copaca’bagneux. Les cris de joie des enfants m’ont sortie de mon rêve. Mince, je n’ai pas la fin, alors je sors mon carnet fétiche et je me mets à écrire le dénouement de cette rêverie… Tragique ou comique ?
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