Cette année, À Mots croisés a choisi de consacrer un cycle d’écriture au « nature writing », littéralement « écrire sur la nature » ou « écrire la nature ». Ce genre littéraire trouve ses origines dans la conquête des territoires des Etats-Unis à la fin du 18ème siècle par les colons. Son fondateur serait le philosophe Henry David Thoreau dont l’œuvre emblématique « Walden ou La vie dans les bois » est ni roman, ni autobiographie, mais un éloge de la nature avec des questionnements d’ordre autobiographiques, philosophiques, sociétaux et politiques.
Le premier atelier, conçu et animé par Ghislaine Tabareau-Desseux, intervenante À Mots croisés, a placé le paysage, la nature sauvage au cœur de l’intrigue.
Le voyage en Guyane
Par Carole Tigoki
Christ souhaitait s’évader, partir dans une contrée lointaine pour oublier ses idées noires. Entre traverser le désert du Niger, passer quelques jours dans un ashram ou suivre les requins blancs dans la mer d’Afrique du sud, il opta pour un voyage en Guyane, une zone subtropicale qui, pensait-il, lui offrirait un bol de nature, un dépaysement total.
Arrivé sur place, après les visites des lieux touristiques traditionnels, il prit un taxi pour la zone du littoral. Après quelques minutes de marche, un vaste banc de mangrove lui apparut. Il fut surpris par le silence de la nature. La végétation verte et abondante semblait figée comme dans un tableau d’un peintre naturaliste. Au milieu de la végétation, l’eau trouble, saumâtre était calme. Les palétuviers en nombre étendaient leurs racines dans un bel enchevêtrement jusqu’à la berge.
L’image de cette nature luxuriante le fascinait. Quelques crabes avançaient en grappes sur la vase et disparaissaient dans les trous qu’ils avaient creusés. Un groupe de hérons verts, le cou enfoncé dans les épaules, attendaient au bord de l’eau le passage de petits poissons pour les attraper. L’air chaud et humide lui était inconfortable. Alors, pour éviter l’insolation, Christ enfonça sa casquette sur sa tête, chaussa ses lunettes de soleil et commença à boire l’eau de sa gourde à petites gorgées. Il eut l’idée d’entrer dans le marais. L’eau peu profonde, le sol mou et instable, lui donnaient l’impression de s’enfoncer. Christ avança avec des grands pas pour s’en échapper. Puis, il porta ses jumelles et vit quelques oiseaux nichés dans les branches des arbres, sans pouvoir les distinguer. Et même si l’odeur de la vase qu’il agitait avec ses chaussures était forte, l’ensemble de cet écosystème naturel le fascinait.
Christ sortit son appareil photo et prit quelques clichés. Soudain, le ciel s’assombrit. Des gouttelettes de pluie s’écrasaient dans le marais d’eau. Les oiseaux s’arrachèrent des branches des palétuviers avec fracas, emportant les feuilles vertes des palétuviers. Il se mit à pleuvoir de plus en plus fort. En un instant, l’eau lui arriva aux genoux. Alors Christ prit la décision de partir.
Il s’approcha de la berge. Le sol était instable et, dans un sursaut de vie, il s’accrocha aux racines des palétuviers pour remonter. Il atterrit dans la vase, et marcha jusqu’au bout de la route principale. Ce voyage dans cette zone subtropicale fut un déclic pour lui. Christ reprit l’avion pour Paris, décidé plus que jamais à mettre de l’ordre dans sa vie.
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