C’est dans l’ADN d’À Mots croisés que de créer des passerelles entre l’écriture et les arts. Il y a quelques jours, le spectacle MADE IN au Plus Petit Cirque du Monde de Bagneux auquel a assisté un groupe de nos écrivants a été prétexte à l’écriture.
Le spectacle, performé par Ilaria Senter et Mikel Ayala, avait pour intention de faire osciller le regard d’adulte et le regard d’enfant face à ce que nous nous imaginions être grands et finalement nos réalités de l’âge adulte. existence. MADE_IN raconte l’humain, ses côtés intimes et tragiques, ses exténuantes contradictions.
Annie Lamiral, intervenante À Mots croisés, a invité les écrivants à imaginer/raconter un récit autour de : « Où sont nos rêves d’enfant ? »
À suivre les récits de Nadia. Bonne lecture !
Rêve … et tu seras !
Emilie a sept ans. Elle joue avec ses poupées et son nounours dans sa chambre, son univers, son cocon protecteur. Elle est maîtresse d’école. Elle a aligné tous ses jouets devant elle. Ce sont ses élèves.
– Bonjour, les enfants, dit-elle ! Aujourd’hui, on va parler de vos rêves ! Inès, dis-nous quels sont les tiens ?
– Je voudrais jouer du piano et aider les gens avec un chien.
– Et toi, Ilaria ?
– Je voudrais être la dame qu’on voit au cirque et qui monte à la barre.
– Et toi, Eric ?
– Je voudrais soigner les gens.
– Et toi, Mathias ?
– Je voudrais trouver un médicament pour aider les malades du cancer.
– Et toi, Jonathan ?
– Je voudrais faire du théâtre avec mes copains, monter sur scène, être quelqu’un d’autre et… ah oui ! penser aussi.
– Et toi, James ?
– Je voudrais être astronaute éboueur, pour nettoyer le ciel et voir comme c’est beau quand c’est tout propre.
– Et toi, Hugo ?
– Je voudrais dessiner et écrire.
– Et toi, Nadia ?
– Je voudrais grandir, être une maman, être une bonne personne et m’aimer.
Vis … et tu grandiras !
Emilie se rêverait danseuse étoile. Elle aime tant voir ces ballerines s’envoler dans les airs, légères, comme portées par un vent invisible.
Ses chevilles en décideront autrement.
Emilie se rêverait majorette. Elles étaient si belles dans leur costume bariolé à la Fête annuelle de la Trinité. Elles avançaient d’un pas cadencé au son de la fanfare.
Un violent retour de bâton la fera changer d’avis.
Puis, viendra le temps du lycée, la découverte d’une matière passionnante.
Emilie sera professeure de philosophie. Oui voilà, ça c’est sûr. Quelle joie, chaque semaine, ces deux heures passées dans la classe 2B ! Ce professeur qui parlait, conceptualisation, problématisation et argumentation lui démontrait qu’elle était capable de réfléchir, de penser et d’avoir une opinion personnelle. Avec ses parents, il lui fallait plier.
Et puis, un jour, Emilie est dans une salle d’accouchement. Contre son sein un petit bonhomme qu’elle vient de mettre au monde.
Son premier enfant.
Emilie sait alors qu’elle voulait être maman. Elle en est certaine. Plus aucun doute. Ce bonheur, elle le connaîtra deux fois, il fera d’elle une femme accomplie.
Elle aura la tête dans les étoiles, elle avancera aux sons du tambour, elle dansera de joie aux premiers babillements, aux premiers pas de ces enfants !
Des questionnements, elle en aura tous les jours, des problèmes à résoudre aussi. Elle réfléchira à la meilleure manière d’y répondre. Elle permettra à ses petits bambins de grandir harmonieusement.
Il lui faudra argumenter souvent, face à ces adultes en devenir…
Emilie, la maternité a comblé une grande partie de tes rêves.
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Illustration : Seth le Globepainter (Julien Malland)
Exposition « We are here », Petit Palais, Paris, 2024
Photo : @annyelleparis
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