Victoire fictive

C’est dans l’ADN d’À Mots croisés que de créer des passerelles entre l’écriture et les arts. Il y a quelques jours, le spectacle MADE IN au Plus Petit Cirque du Monde de Bagneux  auquel a assisté un groupe de nos écrivants a été prétexte à l’écriture.

Le spectacle, performé par Ilaria Senter et Mikel Ayala, avait pour intention de faire osciller le regard d’adulte et le regard d’enfant face à ce que nous nous imaginions être grands et finalement nos réalités de l’âge adulte. existence. MADE_IN raconte l’humain, ses côtés intimes et tragiques, ses exténuantes contradictions.

Annie Lamiral, intervenante À Mots croisés, a invité les écrivants à imaginer/raconter un récit autour de : « Où sont nos rêves d’enfant ? »

À suivre le récit de Nicole. Bonne lecture !

Victoire fictive

Je suis dans un bois clairsemé. Une allée devant moi, toute droite. J’avance tranquille, détendue…mais au bout d’un moment je sens une présence à peine perceptible derrière moi, très lointaine. Je marche un peu plus vite : elle se rapproche…Un coup d’œil en arrière : c’est un homme, un soldat. J’accélère, lui aussi : alors je cours de plus en plus vite.

Au début, j’arrive à le distancer mais, d’un seul coup, malgré tous mes efforts, le sentier sous mes pieds se met à faire le tapis roulant en arrière et je fais du « sur place » ! J’entends un souffle, un bruit de bottes qui se rapprochent, qui se rapprochent… et une main s’abat lourdement sur mon épaule droite ! J’hurle !!!

J’ai cinq ans et ce cauchemar revient souvent, avec le même déroulement, la même force, la même angoisse. Chaque fois, ma mère me retrouve, affolée, dans mon lit ou debout dans ma chambre obscure, les mains en avant, comme si je cherchais une sortie….

J’ai huit ans. Le cauchemar du soldat revient moins souvent mais toujours avec le même scénario, la même force, la même frayeur : la forêt, l’homme au loin, c’est un soldat, la fuite éperdue, le « sur place »… mais à l’instant où il va lever la main sur moi… je lui fais face !!! Avec aplomb, calme et du rire dans la voix, je lui dis : « Tu ne me fais pas peur (je peux le tutoyer depuis le temps qu’il me court après! ).Tu ne me fais pas peur. Je sais que c’est un rêve. Tu es un rêve. Laisse-moi dormir ! ». Je me retourne dans mon lit et replonge dans un bon sommeil.

La réalité venait de chasser la fiction : à compter de cette nuit-là, je n’ai plus jamais refait cet affreux cauchemar !

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Illustration : Marianne par Seth le Globepainter (Julien Malland)

Exposition « We are here », Petit Palais, Paris, 2024

Photo : @annyelleparis

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