A l’automne 2019, Laurent Delhaye, écrivant de notre association depuis deux ans, répondait à un appel à auteur.e.s sur le thème « Que fait l’ombre dans l’ombre ? », lancé par « Les Somnambules », une équipe d’étudiants en master CREM*. Tous s’étaient réunis autour d’un projet commun : publier un recueil de nouvelles illustrées et d’en assurer toutes les étapes de production, depuis la conception de la ligne éditoriale jusqu’à la vente.
L’année 2020 étant celle du Double, c’est le thème qui a été mis au cœur de la réflexion pour la réalisation du recueil. Ce concept du double, le collectif l’a exploré, déconstruit, transformé… pour finalement aboutir au motif de l’Ombre, ce double fidèle et docile qui ne fait que nous suivre – jusqu’au moment où, dans le secret de l’obscurité, il prend soudain vie…
« L’Heure des Ombres », Somnambules Éditions, 2020, Paris, 238 pages.
*Création éditoriale multi-supports
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L’ombre que j’ai croisée
Et toi, l’ombre !
Pourquoi préfères-tu cette place ?
Je t’ai surprise,
abandonnée sur le sol
comme une empreinte de passage,
une éclipse de lumière sans ancrage.
Ta robe jamais regardée
ne glisse plus.
Je m’interpose : « Mais où est passée la lumière ? »
« Elle s’est soustraite et s’excuse de s’être absentée »,
me répond-elle.
Et moi, je tangue,
et mes lignes sombres,
compagnes de mes nuits blanches, caressent le sol.
Fuyantes et déformées, elles patinent en silence
mon espace en formes obscures.
Dans l’axe d’un rayon,
j’entre dans l’ombre,
me couche à bonne distance
et comble l’absence.
Je la rejoins, moi,
l’invisible éclat.
J’ai ma part d’étincelles
Je ne suis que l’ombre de moi-même.
Une ombre aux multiples facettes,
l’autre moi qui reflète…
Une forme qui tournoie
sous les lampes depuis des lustres.
Confondue, j’embrasse l’ombre que j’ai croisée, et le noir éphémère de sa robe nuit m’enveloppe.
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