C’est au tour de Francine de vous inviter à pénétrer son « Bardadrac ». Bonne lecture !
La caverne d’Ali Mamie
Le garçonnet avance dans la pièce fourre-tout, au bout du couloir de la maison de sa grand-mère. Pour lui, c’est la caverne d’Ali Baba.
Les rayons du soleil, passant par les petits carreaux de la fenêtre, font jouer des ombres et lumières sur les objets placés, parfois, avec méthode et d’autres fois, juste posés là où il y a encore un espace libre. La coiffeuse, héritage de sa mère, devant la fenêtre, rayonne sous le meilleur éclairage. Son siège en chêne devant, la cuvette en porcelaine blanche avec des motifs à fleurs bleu marine au milieu du plateau en marbre blanc, le broc à eau assorti sur la gauche, le porte-savon et le vide-poche sur la droite représentent l’exemple même d’une volonté de rangement. Et posé là, sur le rebord, un cendrier avec encore des mégots. Comme dans toutes les pièces de la maison, les cendriers de grand-mère traînent à des endroits insolites. Mamie et sa cigarette, c’est une vieille histoire.
Il aime regarder les photos de vacances, entassées dans une valise en carton, que sa grand-mère a faites de Papi et de Maman enfant. Il essaie de reconnaître les lieux et les époques de leurs vacances à la mer ou à la montagne. Papi a toujours un large sourire et il aime faire des grimaces à l’objectif. Maman le regarde avec beaucoup d’amour et rigole à ses pitreries.
A côté, posée au sol, dans une bassine en plastique rose, les cahiers d’école de Maman qui n’a pas toujours de bonnes notes. Une pile d’assiettes dépareillées et ébréchées, un sac de voyage Vuitton presque neuf, des tableaux de marine d’un peintre breton inconnu et beaucoup d’objets divers et variés entassés depuis bien trop longtemps.
La passion des fleurs de Mamie a été de courte durée et les pauvres plantes ne s’en sont toujours pas remises. Les pots, encore remplis de leur terre et des rogatons de végétation, ont élu domicile derrière la valise. C’est comme le sport, elle a eu une envie de jouer sur la terre battue, mais la raquette de tennis s’appuie nonchalamment sur le mur maintenant, un étui de balles jaunes à ses côtés. La paire de baskets, encore dans sa boîte, a rejoint les cahiers dans la bassine. Sur un portant, les chemises hawaïennes de Papi, souvenirs de leur dernier voyage aux Antilles. Il se souvient de son défilé de mode qu’il leur avait fait dans le salon et des pas de biguine qu’il avait tenté de faire avec Mamie. Il avait ri aux larmes avec sa mère.
Le son de la voix de sa grand-mère, au bas des escaliers, le sort de sa rêverie. C’est l’heure du thé et des petits gâteaux, le goûter et il a faim.
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