Anne nous offre une approche intéressante : se projeter dans le vieux Bagneux en 2030 ! Un récit court et énigmatique. Bonne lecture !
Une brasserie balnéolaise
Le café était toujours là, il n’avait pas été phagocyté par l’appétit vorace d’un promoteur.
Le café était toujours là mais les petites tables simples métalliques vertes et jaunes avaient laissé place à un mobilier plus moderne : il semblait y régner le même esprit, le même parfum de convivialité et de droit au bonheur simple. La place n’avait pas changé avec ses pavés qui lui conférait sa petite touche historique du vieux Bagneux d’antan ou du moins ce qu’il en restait.
Juin 2030, 19 h
Elle s’était assise à une table illuminée encore par les rayons du soleil. En cette fin de semaine, je retrouvais les mêmes profils qu’il y a 7 ans. Deux collègues ou copines d’une quarantaine d’années qui semblaient débriefer chacune à tour de rôle leur semaine éprouvante de chargée de communication à renfort de demis. Un groupe d’amis du quartier qui célébrait visiblement un moment fort à moins que ce ne soit le début du week-end. Les jeunes patrons n’étaient plus là, elle venait d’apprendre qu’ils étaient partis en province -comme on dit à Paris et à Bagneux aussi- du côté de Marseille apparemment. Ce début de week-end semblait tellement identique à ceux qu’ elle avait pu goûter, il y a quelque temps de cela.
Rassurée par la non disparition de ce lieu de convivialité, elle n’avait pas réalisé qu’elle ne connaissait plus personne : pas un seul visage familier, pas la moindre apostrophe. Elle était partie pendant trois ans, puis ce fut l’accident, le fatal l’accident, puis la maison de repos en Bretagne, la vie avait repris son cours et puis, ce mail surgit de nulle part avec ce prénom qu’elle avait classé comme faisant partie du passé : rendez-vous le 20 juin, 19h30 comme autrefois ou tu sais.
Avait-elle changé ? Saurait-elle la reconnaître ? Des siècles s’étaient écoulés. Leurs chemins qu’elle pensait parallèles allaient enfin se recroiser. Elle n’avait pas eu de nouvelles depuis plus de 40 ans. L’incompréhension et la douleur vive avaient laissé place à une mélancolie sourde et une résignation émoussée. Elle avait oublié par la force des choses.
Mais là, tout se ravivait. Une ombre la frôla. Elle leva la tête. Elle était là devant elle .
« Pardonne-moi » furent les premiers mots de leurs retrouvailles.
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