C’est Danielle, originaire du Marais Poitevin, qui nous raconte aujourd’hui une histoire « presque vraie ». Bonne lecture de son autofiction !
Du rêve à la réalité
Quand j’avais 10 ans, je rêvais de partir en Australie élever des moutons. Cela me changerait des chèvres poitevines ! Et surtout, j’avais envie de grands espaces, lassée de l’univers étriqué du Marais Poitevin. A la bibliothèque de Niort, je dévorais les livres qui parlaient de l’Australie. Mais comment s’y prendre pour aller dans un pays si lointain, quand on est une petite fille ?
Doucement, le projet prit forme. D’abord, écrire à l’ambassade d’Australie à Paris, expliquer ma démarche. J’ai bien mis deux ans à écrire cette fameuse lettre. Quand la réponse est arrivée dans la boîte aux lettres, je n’en croyais pas mes yeux. Vivre son rêve était donc possible ? Je le croyais à l’époque : que les chèvres soient très différentes des moutons. Bien sûr, je les aimais bien les chèvres de grand-père, mais j’avais vraiment envie d’autre chose que les emmener paître le long des sentiers.
La marche à suivre était détaillée : d’abord être majeure, puis trouver une ferme d’accueil sur place. Cela se corsait, car la majorité était à 21 ans. Pour la ferme d’accueil, une liste était jointe au courrier de l’ambassade. C’était loin, mais je m’accroche à cette idée … Et si j’en profitais pour apprendre l’anglais ? Cela me serait utile une fois sur place !
Même si jeunesse se conjugue souvent avec impatience, je suivis scrupuleusement les étapes. D’abord choisir la famille hébergente, puis concrétisation le jour de mes 21 ans par l’achat du billet d’avion.
Premier vol en avion : un peu de stress, vite remplacé par l’euphorie d’un nouveau départ. Après 17 h de vol, je débarque à Sydney. Dan et Kerrie Ross, mes fermiers accueillants m’attendent avec une pancarte à mon nom. Je me présente, mais mon anglais leur est incompréhensible. Heureusement, après une heure de conversation un peu pénible, cela s’arrange. Nous prenons la direction de Dubbo, où se situe leur exploitation, à bord d’un 4×4 poussiéreux.
400 km de routes et de pistes nous amènent à destination : une grande ferme perdue au milieu d’hectares de terre rouge à peine recouverte d’une herbe sèche. Il n’a pas beaucoup plu au printemps m’explique Dan. Il poursuit en m’indiquant qu’il élève 5000 moutons, et qu’il est content de mon arrivée, car c’est la période de la tonte.
Après un repos de deux jours, me voilà à pied d’œuvre. Et la tâche est rude et le rythme soutenu : un mouton est tondu toutes les trois minutes. Il faut ensuite ramasser les toisons fraîchement tondues, les jeter sur une table pour les nettoyer, puis balayer la laine.
Les journées s’étalent de 7 h à 17 h 30, avec deux pauses d’une demie-heure, plus une heure pour le déjeuner. Quand arrive à 19 h, l’heure du dîner, toute l’équipe est bien fatiguée, et ne lambine pas devant son assiette.
Au bout d’une semaine de ce rythme soutenu, je n’en peux déjà plus. Je ne m’étais pas imaginé tout ce travail, je rêvais de doux pâturages, des moutons à changer d’herbage….
Le retour à la réalité est rude. Et je me rends compte que, finalement, les chèvres me manquent, et aussi mon Marais Poitevin.
Et c’est ainsi qu’un mois après mon arrivée, j’ai repris l’avion du retour… Du rêve à la réalité, il n’y a qu’un pas qu’il vaut mieux quelquefois ne pas franchir !
Votre commentaire