« Et si on donnait la parole au fils de Chantal ? », demande Maximilien. Proposition validée par tous ! En avant pour un nouveau chapitre de « La Veuve Joyeuse » !
Bonne lecture, bon confinement et restez chez vous !
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Mamie qui déraille. La voix qui part en vrille quand elle parle de Papi. Je ne sais pas s’il était pauvre, radin, mais moi il me manque. La bouche de Maman en berne, décomposée, elle me fait penser à la gueule de Gédéon, le bouledogue anglais obèse de Marc qui pleure dans le vestibule. Trois verres de rouge, deux verres de blanc, si j’ai bien compté : la consommation de la table après l’annonce de Mamie. Et moi devant mon gobelet de Coca. S’ils savaient tous que le Papi radin, comme ils disent, lui au moins il me faisait goûter son vin en cachette.
J’aimais bien Papi, c’est vrai. Mais je n’ai jamais vu Mamie aussi heureuse quand il était là. Les boucles d’oreille qui brillent, le foulard rouge vif et ce parfum qui me donne mal à la tête. Elle me fait rire. Et Maman me pince sous la table : je ne me tiens pas droit ? J’ai fait tomber une tomate cerise ? Non, j’ai juste rigolé. Je ne dois plus rire trop fort depuis que Papa n’est plus là, et Papi non plus. Arrête de te faire remarquer, mange ta langouste ! Drôle de bête inerte dans mon assiette, et qui me semble, à moi, bien plus rigolote quand je l’agite entre mes mains.
Le temps me semble long, tellement long. Les fourmis grimpent, de mes pieds à mes cuisses, et Sylvie me gronde quand je tente de m’en débarrasser en utilisant le super pouvoir clignotant de mes baskets Atemi. Son nez tout drôle, retroussé, on croirait même qu’elle nous renifle tous : « Elle ne peut pas nous sentir », disait Papa. « Elle est née comme ça », disait Papi. Il paraît qu’ils nous observent de là-haut, et laissez-moi vous dire qu’ils doivent se fendre la poire, contrairement à nous. Tout ce qu’il me reste, à moi, ce sont les clins d’œil de Marc qui trifouille son téléphone, Sylvie qui caresse la nappe comme si c’était un petit chat et Maman qui ne me lâche pas la grappe. Et Mamie, toute belle, et ce drôle de monsieur, dans son costume du dimanche, qui nous tourne autour et fait apparaître les assiettes comme par magie. Il m’appelle mon petit bambino et m’aide à trouver les couverts pour manger tout ce qui défile sous mon nez. Du jaune qui craque, des bulles sucrées, de la viande toute tendre. Ça me change des coquillettes de Maman, mais je ne lui dis pas. Puis elle se régale, elle aussi, ou peut-être qu’elle se cache dans son assiette ?
Marc crie, je ne comprends pas ce qu’il dit, mais soudain tout change.
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