C’est au tour de Francine de vous inviter à une nuit tendue et périlleuse, puis à une autre, dans un registre fantasmagorique, inspirée par Anne.
Nuit voilée
Sortir du port en fin de journée pour ne pas alerter les douaniers, mouiller l’ancre dans une crique à l’abri des regards indiscrets et attendre la nuit. Quand le ciel étoilé se pointe, nous pouvons monter les voiles et faire route vers notre destination.
Nous sommes encore trop près des côtes. Nous devons être discrets. Veiller à ce que nos voiles ne claquent pas dans un coup de vent, garder notre pavillon baissé, ne pas avoir de lumière et ne pas faire de bruit ou parler. Les navires des employés de la ferme surveillent le littoral de jour mais surtout de nuit.
Après une bonne heure de navigation à l’aveugle, nous atteignons enfin le large sans problème. Dans une nuit noire sans lune, sous la voûte céleste étoilée nous faisons route vers notre destination toutes voiles dehors.
Le vent doux et chaud de cette nuit du mois d’août gonfle nos voiles et siffle. Le bruit des vagues déchirées en deux par la proue du navire nous annonce une belle nuit. Nous décidons de sortir nos paillasses sur le pont, de nous allonger le nez en l’air et de dormir sous la protection des étoiles des contrebandiers pendant les deux prochaines heures.
La cloche nous réveille en sursaut et nous mettons nos godillots au plus vite. Fini le plaisir, maintenant il faut reprendre notre activité. Nous approchons de la crique des naufragés et nous devons décharger notre précieuse marchandise au plus vite.
Des signaux lumineux dans le noir de la côte nous avertissent que nous pouvons commencer sans danger. Nous descendons une à une les chaloupes à la mer et nous les chargeons au maximum de nos ballots de tabac. A grands coups de rame, nous nous dirigeons vers la plage. Notre déchargement se fait sans encombre et pendant que les hommes vident les chaloupes, le capitaine s’occupe du paiement de la marchandise après quelques négociations viriles.
Nous pouvons regagner le navire, chaloupes maintenant légères, poches bien remplies de pièces et une folle envie de faire la fête en arrivant au port.
La lune qui s’ignorait
C’était durant une de ces nuits entre chien et loup où on devinait les silhouettes filiformes des trolls de la forêt de Grunewald.
Le hibou avait commencé son chant envoûtant. Les ombres allongées des pins sylvestres dansaient une ronde avec les feux follets au son de la musique du vent dans les feuillages des chênes. Dans le ciel, la lueur de la lune dessinait avec les nuages des animaux féeriques qui courent et se déforment selon les caprices des vents. Est-ce que la lune sait ce qu’elle fait ?
Sur le chemin qui les amène chez leurs grands-parents, les enfants se tenant par la main pour se rassurer, ont hâte d’arriver à destination. Ils marchent d’un pas rapide et se retournent à chaque nouveau bruit. Les légendes de la forêt remplissent leur esprit et leur imagination est galopante.
Au détour du virage, les lumières de la maison familiale apparaissent. Ils ont le sourire aux lèvres et leurs cœurs battent maintenant plus de peur, mais de joie.
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