C’est maintenant au tour de Carole de vous ravir avec un ‘Biographème’, construit de façon étonnante en partant d’un chat ! C’est fragment par fragment qu’elle fait lentement apparaître son personnage. Bonne lecture !
Enfin
Mon chat
Mon chat est un Maine Coon brun. Il est très affectueux et aime particulièrement se frotter aux jambes de mes amis. Et comme cette marque d’affection ne plaît pas toujours, quand je les invite à la maison, je l’enferme dans ma chambre.
La nature
Quand j’ai eu neuf ans, je me suis plainte de maux de tête permanents, que les médecins ne sont pas arrivés à expliquer. Plutôt que me soulager à coup de cachetons, mes parents m’ont fait faire de longues balades en forêt, pour m’aérer les neurones. Un naturopathe m’a déconseillé le pain et les pâtes. Il m’a prescrit une alimentation à base d’amandes, de noix, de chocolat noir et de boire d’eau. Quelque temps après, ma santé s’est améliorée.
Grand-père
Je n’ai pas connu mon grand-père maternel ; il est mort peu de temps après ma naissance. Yvette, ma grand-mère disait qu’à certains égards, je lui ressemblais : tout comme lui, j’étais quelqu’un de rêveur et de solitaire. Cette ressemblance à l’homme qu’elle admirait, me ravissait.
Mon père
Mon père était dur avec nous, il n’hésitait pas à se moquer de moi, lorsqu’enfant, j’avais des peurs qu’il jugeait injustifiées. Lorsqu’ il est mort en 1997, j’étais à la fois triste et soulagée. J’ai culpabilisé pendant des années.
Ma mère
Elle m’encourageait en permanence. Elle disait à qui voulait l’entendre, que j’avais du talent. Je compris bien plus tard qu’elle était fière de moi, et que je lui rappelais son père. Cette réputation positive me faisait plaisir et me gênait à la fois, car, comme je n’avais pas encore pu me réaliser, je trouvais sa communication quelque peu précoce.
Mon professeur de philo
À 18 ans, sans qu’il ait eu besoin de me faire la cour, je suis tombée amoureuse de mon professeur de philosophie. Il avait des yeux bleus vert clair et une voix posée. Il venait d’être reçu à son concours d’enseignement. Je le trouvais double ; il était à la fois proche et distant avec nous. J’ai confié mon béguin à ma sœur, qui l’a dit à ma mère. Et ma mère, sans surprise, l’a répété à mon père. Et lui, comme à son habitude, s’est moqué de moi :
– « Comme ça, ma chérie a trouvé l’amour de sa vie, en la personne de Monsieur Jacquier, son prof de philo ? C’est pour quand les fiançailles ? »
Je me suis sentie rabaissée. Honteuse, je me suis refugiée dans ma chambre, avec mon chat qui m’a consolée.
Mon analyste
J’ai démarré une analyse, tout de suite après mes études. Je voulais me découvrir avant de prendre la responsabilité d’avoir des enfants. Au bout de sept années d’analyse, je m’en suis lassée. J’ai donc décidé d’arrêter ma thérapie. J’estimais que je m’étais libérée de la servitude du ressentiment que j’avais contre mon père. Et c’était essentiel. Monsieur Baratier a accusé réception de ma décision sans aucune remarque. En guise d’au revoir, il m’a dit : – « Je prends note de votre décision, Carine, je vous fais entièrement confiance et je crois en vous ! ».
Mon mari
Etienne me trouve lunaire ; il dit que je suis tête en l’air et peu concentrée à la tâche. Je ne suis pas d’accord, mais, pour éviter les disputes stériles, je ne conteste pas, car, je sais que j’ai besoin de longues plages de rêveries pour me sentir bien ; et ce n’est pas négociable.
Ma carrière
Lorsque j’ai eu mon bac, mes parents m’ont inscrit à l’Ecole des Beaux-arts.
A 24 ans, j’étais diplômée de la School Arts de Paris. Cinq ans après, je suis entrée à l’Ecole de dessin du Louvre pour développer ma technique. J’étais sûre de mon talent, et persuadée que les contrats pleuvraient. Au lieu de cela, j’ai erré de petits contrats en petits contrats, sans véritablement pouvoir percer. Fort heureusement, Etienne faisait tourner notre foyer, de sorte que nos filles n’ont manqué de rien.
La prison de Fresnes
Il y a deux ans, j’ai obtenu un contrat de prestation à la prison de Fresnes. Je devais proposer, une journée par semaine, des cours de dessin à des femmes détenues pour de longues peines. La commande était libre. Elles dessinaient très souvent des visages déformés ou des figures abstraites. Elles exprimaient sûrement ainsi leur tristesse. C’était très touchant.
L’exposition
J’ai eu la chance d’exposer mes dessins en exposition permanente à la Maison des Arts du quatorzième arrondissement. C’était ma première exposition et j’en étais très fière. Le thème de l’exposition « Le corps multiple de la femme ». Il s’agissait d’une trentaine de dessins en noir et blanc représentant des femmes dans leur nudité. Certains mots apposés sur le livre d’or me ravissaient : unique, sensuel, fantastique, réaliste, universel… J’étais émue et très fière. Suite à cette exposition, j’ai été contactée pour d’autres expositions. Je me suis sentie enfin reconnue !
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