Démarrons notre série de récits sur « La prise de risque » avec celui de Danielle qui nous plonge dans l’actualité ! Bonne lecture !
Mots à maux
Premier meeting de campagne du premier tour des élections législatives. La salle du Zénith est bondée. Mais qu’est-ce qu’il lui a pris de s’engager dans cette galère ?
Jamais il n’avait pensé relever un tel défi. Lui, député ? Ses copains de fac rigoleraient de lui, c’est sûr, qui ne pouvait présenter un exposé sans bafouiller lamentablement. Pourtant, l’envie de changer les choses, d’améliorer la vie de ses concitoyens, avait petit à petit fait son chemin.
Et il est là, ce soir, dans son costume bleu marine, chemise blanche et cravate rouge, prêt à se lancer dans l’arène, pour déployer son programme et gagner les électeurs à sa cause. Il est passé dans le fauteuil de la maquilleuse, car son discours va être retransmis en direct sur les chaînes d’infos en continu. Il n’aurait jamais cru devoir se maquiller quand il est entré en politique ! Le voilà devenu acteur de cinéma, avec ce fond de teint qui lui donnait bonne mine, et ses cheveux savamment coiffés.
La salle s’impatiente, il le sent aux murmures qui deviennent des injonctions. Des applaudissements appellent sa venue sur scène. Il n’y a plus à tergiverser. C’est l’heure. Le chauffeur de salle l’annonce.
Jean Dutour quitte le rideau qui le cache, et s’avance, seul, sous la lumière des projecteurs. Une clameur s’élève. Le voici, l’homme providentiel, celui qui guérira tous leurs maux.
Il s’avance à pas décidés vers le micro, pose son discours sur le pupitre, précaution presque inutile car son texte il l’a appris par cœur. Mais cela le rassure de le sentir là, si proche.Il faut se lancer maintenant. Pourvu qu’il ne bafouille pas !
Il commence « Chers amis, chers camarades, Mesdames, Messieurs ». Les mots glissent en un long chapelet de promesses. Il égrène sa litanie, comme un curé, le dimanche, à la messe. Et à chaque nouvelle annonce, la salle réagit en applaudissant, en lançant des bravos.
Il les tient en haleine, des trémolos dans la voix, quand il évoque la vie difficile, qui ne le sera plus lorsqu’il sera élu. C’est si simple, le bonheur. Il suffit juste d’y croire.
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